PUBLIÉ LE 04/08/2010 08:03

Auch. "On ne se remet pas du meurtre d'un fils

Joël et Corinne Censier viennent de partir en Espagne. Trois semaines de répit pour tenter de ne pas penser au meurtre de Jérémy, assassiné il y a un an à Nay. Juste avant leur départ de Saint-Cricq, ils ont accepté de se livrer... en espérant être entendu par la justice.
Partir. Partir loin de Saint-Cricq, pour ne plus tourner en rond dans une maison où le sourire d'un mort plane partout. Quasiment un an jour pour jour après le meurtre de leur fils Jérémy, assassiné lors des fêtes de Nay l'été dernier, Corinne et Joël Censier ont décidé de s'offrir quelques jours en Espagne. Une fuite illusoire pour recharger d'hypothétiques batteries et affronter le moins mal possible la journée du 22 août. Il y a des anniversaires dont on se passerait… Juste avant de boucler sa valise, Joël ressasse une énième fois le dossier d'instruction grâce auquel il a localisé les acteurs du drame minute par minute dans sa reconstitution virtuelle. L'ancien policier auscitain n'a pas perdu ses réflexes, même en arrêt maladie. Mais le père désespère. « Un jour, ils disent blanc. Le lendemain, ils disent noir. C'est leur tactique de semer le flou dans cette affaire. »
Ils, ce sont les trois jeunes en détention provisoire depuis leur mise en examen pour homicide, mais aussi les onze autres personnes en liberté sous contrôle judiciaire à cause de leur implication à des degrés divers dans la bagarre qui a coûté la vie à Jérémy. Qui l'a déclenchée et pourquoi ? Qui a donné les coups de couteau ? Qui s'est acharné à coup de pied sur le visage de Jérémy alors qu'il était mourant au sol ? Sans réponse à ces questions, Joël ne peut pas penser à reconstruire sa vie. Alors forcément, il est en colère. En colère contre des suspects qui avouent et se rétractent. En colère contre des avocats qui entendent demander l'annulation de la procédure suite à l'avis du Conseil constitutionnel qui a jugé la semaine dernière que le régime ordinaire de la garde à vue ne respectait pas les droits et libertés des citoyens. En colère contre ceux qui l'empêchent de faire son deuil. « Que la justice fasse son travail et prononce des peines à la hauteur du crime odieux qui a été commis », demande fermement Joël. Un vœu pieux pour ne pas crier. Car Joël le sait, le temps ne joue pas pour lui.
« Chaque jour, ou presque, on apprend de nouveaux détails qui viennent ouvrir la plaie béante qui est la nôtre ; ça nous enfonce un peu plus dans le trou duquel on essaie de s'extirper. Le deuil de Jérémy, on le fera peut-être, quand tous les procès seront terminés. Mais aujourd'hui, j'enrage de voir Corinne pleurer et de ne rien pouvoir faire. Je ne vois plus d'étincelle dans ses yeux. Même si la justice fait quelque chose, on vivra avec ça jusqu'à la fin de notre vie. »
Nouvelle demande de remise en liberté
La chambre de l'instruction de la cour d'appel de Pau statuera demain sur la demande de remise en liberté sous contrôle judiciaire effectuée par Alberto, un jeune mis en examen pour homicide, fin mai, suite à deux témoignages anonymes tardifs survenus dans l'enquête sur le meurtre de Jérémy Censier.
La semaine dernière, elle avait rejeté celle de Jonathan, ce Gersois âgé de 26 ans qui se trouve être le demi frère de l'auteur supposé des coups de couteau sur Jérémy. Un soulagement pour la famille Censier qui avait très mal vécu la décision du juge de l'application des peines qui avait ordonné la remise en liberté de Jonathan le 20 juillet. Mais le ministère public avait aussitôt interjeté appel.
Béatrice Dillies

http://www.ladepeche.fr/article/2010/08/04/883942-auch-on-ne-se-remet-pas-du-meurtre-d-un-fils.html