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"J'ai caché le corps": le SMS qui n'a pas fait rire la policePublié le jeudi 10 janvier 2013 à 07h11
Suivant les conseils mal avisés d'un réseau social, Ornella, une Roquebrunoise de 19 ans a envoyé d'inquiétants textos à des inconnus. Mais sa mère dénonce les conditions de son interpellation Du texto à la convocation en justice : la jeune fille espère que son expérience servira à d'autres.
"C'est bon, j'ai caché le corps. On fait quoi maintenant ?" Chacun appréciera le contenu de ce SMS reçu par une dizaine de personnes, dont les numéros ont été composés au hasard, dans la nuit du 2 au 3 janvier dernier.
À l'origine, deux jeunes Roquebrunoises qui s'ennuient en ce lendemain de Saint-Sylvestre. Et un « passe-temps » découvert sur Facebook.
Mais dans la nuit, fortement secoué par ce message anonyme, l'un des destinataires choisis au hasard, prend contact avec la gendarmerie de l'Alpes d'Huez où il demeure. La machine est lancée : « On est dans le cadre d'une procédure criminelle, soit pour homicide, soit pour recel de cadavre,explique le commissaire de Menton, Eric Joudelat, dont les services ont traité cette affaire.Il y a présomption de crime et cela demande une réaction immédiate. Une procédure de recherche en téléphonie a été lancée, suivie par la mise en place d'une surveillance de police. L'interpellation a eu lieu dans le cadre d'une procédure de flagrant délit.»
À l'arrivée, alors que sa « complice » n'était pas inquiétée, l'auteur du message, Ornella Cuvillon, a été interpellée à son domicile de l'avenue Bedoux, le 4 au matin .
Une expérience qu'elle et sa mère ne sont pas prêtes d'oublier : « A 9 heures, trois policiers en civil se sont présentés à mon domicile en demandant à voir ma fille, raconte Nathalie Cuvillon. N'ayant pas voulu les laisser rentrer, je suis moi-même allée la réveiller. Ils lui ont montré un papier et demandé si elle avait écrit le texte qui y figurait. Elle leur a confirmé en précisant que c'était une blague. Et là, ils l'ont embarquée en refusant que je l'accompagne. »
Une différence de perception
Nathalie fait alors le rapprochement avec trois véhicules de police, dont un banalisé, qu'elle avait repérés la veille au soir alors qu'elle sortait avec sa famille pour fêter son anniversaire.
« Je n'aurais jamais imaginé que c'était pour ma fille… ».
Alors qu'elle est entendue au commissariat de Menton, Ornella reconnaît les faits et écope d'une présentation devant le juge le 30 janvier prochain avec à la clef un rappel à la loi pour « dénonciation mensongère d'un crime ».
Si elle ne remet pas en question cette sanction, Nathalie, plus choquée que sa fille, dénonce le « traitement » dont Ornella a fait l'objet.
« On est venu la chercher en pyjama, sans lui laisser le temps de passer une veste. Sans me dire ce qu'il se passait. On lui a crié dessus, menacé de lui reprendre son permis de conduire, dit qu'elle ne trouverait plus de travail à Monaco parce qu'elle aurait un casier. On a aussi hurlé sur moi. Les policiers voulaient lui donner une bonne leçon, mais c'était hors de propos pour une gamine de 19 ans qui n'a jamais rien fait de mal ».
Mais pour le commissaire Eric Joudelat, il n'y a aucune ambiguïté dans cette affaire : « On est très loin d'un calembour de carabin. Cela n'a fait rire ni les gendarmes isérois, ni le TGI de Nice, ni les policiers mentonnais. Et encore moins la personne qui a reçu ce SMS. »
Quant au « traitement » subi par Ornella, le commissaire se veut très clair : « Les directives du magistrat permettaient d'exercer la coercition. Ce n'a pas été le cas. Les policiers ont même agi avec beaucoup de discernement. Il n'y a d'ailleurs pas eu de garde-à-vue. Il y a une disproportion dans la perception de la gravité des faits de cette famille et la nôtre».
Et de conclure : « Il faut que les auteurs de ces faits prennent conscience de leurs responsabilités. Cela déclenche des procédures lourdes et coûteuses. Sans parler de l'impact psychologique pour les victimes.»
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